La laine, la fibre artistique

 Heureux hasards des liens qui se tissent entre les personnes d’Ardelaine et les clients solidaires aux compétences très diversifiées. Le domaine artistique était resté jusqu’alors en marge des préoccupations de l’entreprise. Mais la rencontre avec un enseignant formateur en arts visuels et histoire de l’art a permis peu à peu la mise en place d’un partenariat autour de la laine dans tous ses états. C’est ainsi que la fibre artistique s’est réveillée en nous !

… Mais la fibre artistique c’est quoi au juste ?

La fibre artistique

Lorsque on évoque la laine, la notion de « fibre » apparaît presque instantanément. De manière plus générale, il s’agit d’éléments allongés constitutifs d’un fil, du bois, ou d’éléments d’aspect filamenteux qui constituent certains tissus (fibre musculaire, fibre nerveuse, fibres optiques…)
Les fibres participent à la structuration d’un ensemble. Organisées en réseaux, en faisceaux, elles ont aussi une fonction de connexion et permettent la circulation des énergies.
Tresser, nouer, tisser des liens, construire un réseau, sont autant d’actions au cœur du travail quotidien de la Scop Ardelaine Mais ce sont aussi des notions qui font écho à une certaine éthique.

C’est quoi la fibre artistique?

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Avoir la « fibre », c’est avoir une sensibilité particulière pour un sujet ou un domaine dans ce qu’il a de plus profond et de singulier.
Ainsi, la fibre artistique permet une approche sensible et artistique du matériau « laine ».

Sentir la laine, qu’elle soit brute, chargée de suint après la tonte, lavée, cardée, en fil, tissée, teintée… L’explorer physiquement, par tous les sens, expérimenter ses propriétés physiques, tester jusqu’aux limites et inventer, imaginer des possibles, et construire… en marge des conventions, des habitudes… révéler les richesses potentielles, interpeler le regardeur.

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C’est une prise de distance et de conscience par rapport à la finalité productive de l’entreprise. C’est établir des passerelles, des ponts entre un matériau de base « la laine », des techniques de transformation, des gestes, des hommes et une relation au « sens ».

Il s’agit d’appréhender ce matériau et les gestes associés à sa transformation (tisser, lier, relier, filer, carder, nouer, répéter, alterner…) en termes de concepts (espace, temps. . .), de notions abstraites (couleurs, matières, textures, structures) et actions plastiques. Les fibres, le fil sont des lignes. Les nœuds des points. Un pan de tissu, un plan. Le point, la ligne, le plan, la couleur, la matière, la structure, l’espace sont les principaux éléments du langage plastique, au cœur du travail des artistes plasticiens.

Quel intérêt pour Ardelaine?

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Aucune évidence apriori. Dans une première approche extérieure, cet intérêt ne s’impose pas, et un travail sur le long terme est nécessaire pour le faire émerger.
Une création d’art pur est à la fois inutile et essentielle.

•    Inutile en ce sens qu’elle ne rapporte rien dans un système de production ou la valeur marchande des produits est liée à une fonctionnalité précise et immédiate.

•    Essentielle parce que la relation à l’art nous oblige à un regard en profondeur, permet de faire émerger le sens. Elle introduit la créativité non seulement dans les créations plastiques, mais à travers les gestes banals du quotidien au sein des différentes activités de l’entreprise.

•    Parce qu’elle intervient sur les domaines de l’«Humain». Ainsi, la réalisation d’objets symboliques nous relie aux origines de l’humanité, aux archétypes, à notre mémoire collective. Le tissage et le tressage sont à l’origine de la sédentarisation des peuples par le tressage des branches, roseaux (lignes) qui ont permis la construction d’abris et donné naissance à l’architecture (organisation de plans dans l’espace)

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•    Les actions de lier, relier, nouer, assembler et par la même alterner, inverser, répéter sont à la fois au centre des gestes quotidiens liés au travail de transformation du matériau brut « la laine », et elles sont également en lien avec des structures rythmiques fondamentales au cœur de la vie même de chaque individu, chaque être vivant ; rythme binaire : rythme sanguin, ingestions/digestion, inspiration/expiration, veille /sommeil, alternance jour/nuit, etc.

•    Intérêt pour Ardelaine parce que cette dimension artistique mobilise un public nouveau.

•    Parce que cette ouverture est un « plus » qui marque une différence avec d’autres structures.

« L’art s’insère à mi-chemin entre la connaissance scientifique et la pensée mythique ou magique; car tout le monde sait que l’artiste tient à la fois du savant et du bricoleur : avec des moyens artisanaux, il confectionne un objet matériel qui est en même temps un objet de connaissance »          Claude Lévi-Strauss

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Comment ?

–  Par une série d’actions en direction des personnels, employés d’Ardelaine (Stage « tisser sa toile », stage « chutes et rechutes… de tricot »)
–  Par la mise en place d’un programme de formation d’animateurs et la création d’ateliers créatifs pour les enfants, pour parents /enfants : conception, objectifs de production, organisation matérielle, conduite des ateliers compte tenu de l’âge des enfants, références artistiques pour l’ancrage culturel.
–  Par la création de stages artistiques pour adultes. (« Sculpter avec la laine », « Chutes de tricot », « Tissages créatifs »… etc.)
–  Par une politique d’exposition et de valorisation des réalisations plastiques dans l’espace de l’entreprise

Bernard Fournier
Le 2 juillet 2016

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